Donner sens à sa vie améliore l’espérance de vie
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La solitude peut avoir des impacts aussi grave sur la santé que l’obésité ou le tabagisme, via des risques de maladies cardiovasculaires ou des troubles neurodégénératifs. Jessica Morton, doctorante UCLouvain, a consacré sa thèse à l’étude des liens entre participation sociale et santé. Le constat ? Participer à des projets concrets, porteurs de sens, a un impact indéniable sur la bonne santé des personnes, à tel point que cette participation sociale pourrait rejoindre le rang des prescriptions, sociale dans ce cas, comme traitement potentiel contre la solitude.
La solitude, fléau des sociétés contemporaines axées sur l’individu, engendre des conséquences sanitaires aussi graves que l'obésité ou le tabagisme. Les risques de développer des maladies cardiovasculaires, des troubles neurodégénératifs, ou de faire face à une mortalité précoce, sont significativement accrus chez les individus en situation d'isolement. Pourtant, le nombre de personnes affectées par ce phénomène ne cesse de croître, sans distinction de genre ou d'âge, faisant de la solitude un risque universel.
La conséquence ? Les personnes isolées, sans participation sociale, sont celles qui ont la consommation la plus élevée en termes de soins de santé et médicaments, solutions souvent inadéquates face à la solitude. Aujourd’hui, 50 % des patient·es sollicitant leur médecin généraliste, le font suite à des angoisses ou de l’anxiété liées à la solitude (15 % chez les ados et 45 % chez les + de 65 ans).
Face à ces constats, Jessica Morton, doctorante à l’Institut de recherche en sciences psychologiques de l’UCLouvain, a exploré dans sa thèse l’efficacité des réponses sociales plutôt que médicales, pour faire face à la solitude, et, parmi elles, l’impact de la participation sociale sur la santé, mettant en lumière les mécanismes psychologiques sous-jacents, tels que l'identité sociale, le sentiment de sens et le soutien social perçu.
Aujourd’hui, bien que la participation à la vie sociale soit reconnue pour ses bénéfices sur la santé, sa mise en œuvre se heurte aux barrières des sociétés ultra-individualisées. Les programmes de prescription sociale, bien que prometteurs, peinent à démontrer leur efficacité, les associations locales manquant souvent des ressources nécessaires pour accompagner ces publics fragilisés. La chercheuse UCLouvain a donc étayé l’impact de la participation sociale auprès d’un échantillon de 4 988 personnes (18 à 92 ans), représentatives de la population belge majeure, en collaboration avec les Mutualités chrétiennes. Parmi ses observations, on retient :
- Le simple fait de rejoindre un groupe social, en dehors de la maison et du travail, a un impact positif sur la santé
- Les possibilités de participation sociale sont multiples :
- Être moteur·trice aura un impact accru sur la santé. Néanmoins, même une participation passive permet d’augmenter significativement le niveau de bien-être et donc le sentiment d’appartenance
- Tous les types de personnalité peuvent trouver leur place dans un groupe et donc bénéficier d’un apport social
- Étendre sa participation sociale à plusieurs groupes permet de répondre à divers besoins sociaux complémentaires et augmente également les bienfaits de la socialisation
- L’impact de la participation sociale va au-delà des diversités. Le handicap et la maladie par ex. ne constituent pas des freins, il s’agit juste d’envisager la participation sociale autrement
- Le partage d’une identité sociale favorise l’adhésion au groupe. Exemples ? Participer à une chorale permet la synchronisation par la voix et le geste et donc de faire corps, ensemble ; se réunir dans le cadre d’une activité de folklore (Gilles de Binche ou Doudou) suscite une synchronisation émotionnelle et/ou comportementale et agit sur le sentiment d’appartenance
Face à ces constats, la chercheuse UCLouvain propose une recommandation concrète, à savoir un recours davantage systématique à l’accompagnement psychologique individuel. Cela peut paraître évident mais la réalité aujourd’hui est autre : lorsqu’une personne souffre de solitude, elle est souvent prise en charge par son médecin généraliste et traitée avec des médicaments. Alors que, à titre de comparaison, dans le cas de la dépression, le réflexe est de renvoyer la personne vers un·e psychologue. Le message de Jessica Morton : « l’accompagnement psychologique individuel et adapté offre une piste complémentaire à la participation sociale. »