Care-Takers (-support) Laboratory of Housing
lab | Louvain-la-Neuve, Bruxelles Saint-Gilles, Tournai

Le projet de recherche CareTaker/receiver Resilience Laboratory of Housing (CTRL+H) porte sur les vulnérabilités résidentielles et le travail de care dans le logement collectif en Région Bruxelles-capitale (RBC). Nous définissions le travail de care résidentiel comme une activité essentielle au maintien de la vie, inégalement répartie qui prend place dans le logement et ses abords, et participe à l’empouvoirement des habitant·es et des communautés locales ou, au contraire, au renforcement des inégalités systémiques de la société ci-hétéro-patriarcale, néo-libérale et colonisaliste.
La recherche CTRL+H apporte un éclairage sur deux crises concomitantes auxquelles la RBC fait face : la crise du logement abordable et la crise du care. Alors que ces deux crises sont souvent étudiées de manière distinctes, le projet CTRL+H appréhende ces deux phénomènes conjointement en embrassant une perspective au plus près de la réalité sociale et du vécu des citoyen·nes.
Depuis le début des années 2000 en RBC, la crise du logement abordable se définit à partir de plusieurs facteurs s’influençant mutuellement: la rareté du foncier, le taux d’effort important des ménages, l’augmentation du nombre de demandes de logements sociaux, l’inadaptation du parc, la rénovation énergétique et la sur/sous-occupation des logements. L’identification d’une crise du care dans les pays occidentaux capitalistes date sensiblement de la même période ; plusieurs facteurs la déterminent : le vieillissement de la population, l’affaiblissement de l’État-Providence, la dégradation des formes de solidarité locale, les évolutions démographiques et l’augmentation du travail salarié des femmes. La crise du care pose la question de nos vulnérabilités réciproques, de nos dépendances et de la prise en charge de celles-ci. Dans la recherche CTRL+H, le care est mobilisé pour renouveler le regard porté sur le logement et les rapports sociaux qui s’y déploient. Le projet vise à répondre à la question suivante : dans quelles mesures le travail de care permet-il de lutter contre les vulnérabilités résidentielles ?

Les 4 scénarios repris dans cette playlist sont issus des résultats du projet de recherche CTRL+H pour Care-Takers(-supports) Laboratory of Housing soutenu par un financement Innoviris – Prospective Research. Ce projet s’adresse à deux crises concomitantes en Région bruxelloise, celle du logement abordable et du care.
Entre 2021 et 2025, une équipe de chercheurses en sciences sociales, architecture et urbanisme, a enquêté dans des ensembles de logements collectifs de la Région bruxelloise pour identifier les caretakers (personnes qui prennent en charge le travail du soin) et les caresupports (espaces qui soutiennent le travail de soin).
Grâce au travail ethnographique, des variables de la situation résidentielle en RBC ont été identifiées et projetées dans des sociétés distinctes en 2050. Ces films posent les questions suivantes : par qui est réalisé le travail de care dans et aux abords des logements ? Quelle reconnaissance pour ce travail essentiel à la vie ? Comment les aménagements spatiaux peuvent soutenir ce travail ? Et plus fondamentalement, comment repenser la ville au prisme du travail de care ? Pendant des décennies, les villes ont été pensées pour répondre aux besoins du travail productif, comment imaginer des scénarios où le travail de care deviendrait central dans la production de la ville et dans l’organisation de la vie quotidienne ? Les scénarios mettent en lumière le rôle des habitant·es, de l'industrie de la technologie, du monde associatif et de l'État.
La société du care néo-communautaire est locale, horizontale et autogérée, organisée par commissions sectorielles (logement, alimentation, transport, etc.). Le care est la valeur centrale, considéré comme une activité universelle, partagée entre les humain·es, les non-humain·es et l’environnement. Chaque personne alterne les rôles de caretaker et carereceiver dans une logique d’interdépendance. L’énergie est utilisée avec frugalité, prioritairement pour les secteurs vitaux. Toutes les activités sont relocalisées, favorisant des savoirs partagés et des pratiques peu énergivores. Ce modèle produit une gouvernance lente, fondée sur la co-construction et des projets à petite échelle.
La société du care libéraltech est contrôlée par les géants du numérique. À Bruxelles, ces entreprises redessinent les quartiers selon la rentabilité algorithmique, transformant l’espace urbain en un territoire en perpétuelle mutation. L’accès aux IA et aux applications détermine la hiérarchie sociale, accentuant la fracture numérique et la ségrégation spatiale. L’individu isolé devient l’unité de production, dans une société à très faible natalité où les relations humaines sont méprisées. Le care est dévalorisé, confié aux minorités ou automatisé par les IA. L’accès au logement, à la santé et à l’éducation dépend de l’indice de valeur calculé par les IA sur la base des données comportementales.
La société du care associativiste repose sur un État qui régule et finance un réseau d’associations décentralisées, responsables de la production industrielle et du travail de care. Chaque personne reçoit un revenu universel (rang 0), augmenté selon son engagement dans des associations classées de rang 1 à 5, les plus hautes assurant les services vitaux. Le logement est sorti du marché et géré par des coopératives d’habitant·es ou des associations, avec les co-habitats comme norme dominante. L’économie s’appuie sur quatre piliers : taxation écologique (Fonds de Soutien Regénératif), contribution inter-associative, monnaie publique non spéculative et pairage horizontal. Le pouvoir est confié aux personnes issues des marges ayant dirigé des associations de rang 5, tirées au sort pour gouverner. Une normativité du care s’est imposée, poussant certain·es à se retirer volontairement ou à rester en périphérie sous le statut de non-lié·e volontaire.
La société du care familiale-nationaliste : Les Nations-Unies d’Europe forment une fédération d’États gouvernés par des partis d’extrême droite climato-sceptiques, prônant protectionnisme et capitalisme industriel. La nation et la famille sont les piliers. Le ministère de la famille contrôle les droits reproductifs (interdiction de l’avortement, encadrement du care). La société est hiérarchisée par catégories de fonctionnaires. Le travail de care est assuré par les femmes, les mères ou les fonctionnaires subalternes. Les personnes déviantes (LGBTQ+, prostitué·es) ou dissidentes sont surveillées ou expulsées. Bruxelles, capitale du régime, est divisée en quartiers nationaux, vitrine d’une Europe familiale, ségrégée et épurée.