Jobs étudiants : 650h, une fausse bonne idée ?
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Une vaste enquête met en lumière la réalité du travail rémunéré chez les étudiant.es de l’UCLouvain. Elle révèle des inégalités sociales et souligne un risque d’échec académique accru lié à l’augmentation du quota d’heures annuelles.
Avec plus de 2500 réponses récoltées, cette étude, menée par l’équipe du Laboratoire d’Analyse du Travail Etudiant (LASTE) à l’UCLouvain en 2024-2025, révèle qu’une majorité (63%) des étudiant·es ont exercé un emploi rémunéré au cours de l’année 2024. Le phénomène, bien que souvent attribué à la précarité étudiante, se révèle plus complexe.
Les principaux secteurs d’embauche sont l’Horeca et la distribution, qui exploitent une main-d’œuvre flexible. En moyenne, les étudiant.es gagnent 13,31€ de l’heure et 57,5% travaillent 200 heures ou moins par an (et 42,5% plus de 200 heures). Toutefois, 12,5% des jobistes dépassent les 500 heures, ce qui n’est pas sans conséquences.
Loin de se limiter à une réponse à des besoins essentiels, le job étudiant finance aussi des loisirs (73%) et des voyages (79%). Mais pour une frange non négligeable (8,7%), ces emplois (et autres activités rémunérées) permettent de couvrir l’entièreté des besoins alimentaires de base. Cela souligne des inégalités socio-économiques marquées : les étudiant·es issu·es de milieux modestes jobent davantage, et plus intensivement, que ceux dont les parents sont diplômés de l’enseignement supérieur.
Les effets sur la réussite académique sont nets. Les étudiant·es travaillant plus de 500 heures par an réussissent moins de crédits et redoublent plus souvent. L’intensité du travail serait donc un facteur de désavantage scolaire, d’autant plus préoccupant dans le contexte de l’augmentation du quota légal à 650 heures annuelles.
Enfin, les différences de genre sont également présentes : les filles gagnent légèrement moins que les garçons (13,15€ contre 13,50€), ce qui est néanmoins statistiquement significatif. Cependant, elles travaillent en moyenne davantage (243 heures contre 221 heures), ce qui est aussi significatif. Une inégalité qui s’ajoute à d’autres.
En conclusion, si le job étudiant apparaît comme une norme de plus en plus intériorisée, il agit comme révélateur et amplificateur d’inégalités sociales préexistantes. Il appelle ainsi à une réflexion approfondie sur les politiques d’accompagnement des étudiant·es et les conditions d'accès à l’enseignement supérieur.
Ces résultats seront présentés à l’UCLouvain le 15 mai prochain lors d’un colloque sur le travail des étudiants dans le cadre d’une activité Circle U. où des étudiant.es de l’Université Paris Cité viendront également présenter leurs résultats de recherche.
Une année d’étude équivaut à une année de travail salariéUne année d’études à l’université suppose qu’un·e étudiant·e réussisse 60 crédits d’enseignements. Un crédit équivaut entre 27h et 30h de travail étudiant (l’assistance aux cours ne représentant qu’une partie de ce travail). Ainsi, 60 crédits correspondent entre 1620 et 1800 heures de travail consacrées aux études sur l’année, c’est-à-dire l’équivalent d’un temps plein annuel pour un·e travailleur·euse salarié·e. Dans le même temps, les étudiant·es étaient légalement autorisé·es, pour l’année 2024, à prester jusqu’à 600 heures de contrat d’emploi étudiant, soit l’équivalent d’un tiers temps pour un·e travailleur·euse salarié·e. Pour 2025, la limite est fixée à 650 heures. Un cours de 30h et comptant pour 5 crédits, ce qui est fréquent, implique théoriquement 30h d’assistance au cours et environ 120h de travail en dehors (réalisation de travaux, étude de la matière, passation des examens…). |