Les volcans explosifs, véritables pièges à carbone
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En bref :
Contact presse : Pierre Delmelle, professeur au Earth and Life Institute de l’UCLouvain : gsm sur demande |
On les connaît pour leurs colères spectaculaires, leurs coulées de lave incandescentes et leurs nuages de cendres qui obscurcissent le ciel. Mais derrière leur image de destructeurs, les volcans cachent une facette beaucoup plus discrète... et bénéfique pour le climat.
Une équipe de scientifiques de l’UCLouvain, en collaboration avec l’Université de Genève, a mis en lumière un phénomène méconnu : les éruptions volcaniques explosives peuvent, sur le long terme, contribuer à capturer du carbone atmosphérique et à le stocker durablement dans les sols. Les résultats de cette étude sont publiés dans la revue Nature Communications.
L’équipe de recherche, dirigée par Pierre Delmelle, professeur au Earth and Life Institute de l’UCLouvain, a émis l’hypothèse que les éruptions explosives ne créent pas seulement de nouveaux sols volcaniques riches en carbone, mais qu’elles enfouissent également ceux déjà existants, piégeant ainsi le carbone atmosphérique pour des millénaires.
Pour tester cette idée, l’équipe a mené des travaux de terrain dans les Andes équatoriennes, dans une région recouverte il y a environ 2 270 ans par des téphras issus d’une importante éruption explosive. Leurs mesures ont montré que cette éruption avait enfoui et préservé plus de carbone dans les sols qu’elle n’en avait libéré dans l’atmosphère.
Lorsqu’une éruption explosive se produit, le volcan dépose d’épaisses couches de cendres, appelées « téphras ». Ces dépôts servent généralement de substrat à la formation de sols volcaniques, lesquels possèdent une capacité remarquable à accumuler et à retenir le carbone organique. Ce carbone provient des plantes qui capturent le CO₂ atmosphérique par photosynthèse. Lorsqu’elles meurent, une partie de leur carbone est stockée dans le sol sous forme de matière organique. À partir de ces résultats, les scientifiques ont élaboré un modèle pour estimer la quantité de carbone organique enfouie dans les sols ayant été affectés de manière répétée par des éruptions explosives au fil du temps.
En Équateur, même les estimations les plus prudentes suggèrent que ce processus a séquestré suffisamment de carbone organique au cours de l’Holocène (sur les 12 000 dernières années) pour représenter jusqu’à un tiers du stock total de carbone des sols du pays.
Fait remarquable : le professeur UCLouvain et son équipe ont découvert que la quantité de carbone stockée dans les sols volcaniques dépasse les émissions cumulées de carbone des éruptions responsables de leur enfouissement, dans un rapport de 3 à 15. Ces événements explosifs deviennent ainsi « négatifs en carbone ».
Cette recherche met donc en lumière le rôle inattendu que peuvent jouer les volcans explosifs dans le bilan carbone de la Terre en tant qu’agents de stockage de carbone à long terme : « nous savons depuis longtemps que les volcans dégazent la Terre, mais il faut désormais aussi considérer leur capacité à retirer du carbone de l’atmosphère en le piégeant dans les sols », explique Pierre Delmelle.
© Pierre Delmelle