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C. trav. Bruxelles, 13 mars 2025, R.G. n° 2025/CB/2

cedie | Louvain-la-Neuve

cedie
5 June 2025

Première demande de protection internationale ou demande ultérieure ? La réception en droit belge de l’arrêt Khan Yunis et Baabda de la Cour de justice de l’Union européenne

Protection internationale – Accueil – Réfugié reconnu dans un autre État membre – Khan Yunis et Baabda – Demande ultérieure – Décision motivée et individuelle.

La Cour du travail de Bruxelles précise dans cet arrêt qu’une demande de protection internationale d’un réfugié reconnu dans un autre pays de l’Union européenne ne constitue pas une demande ultérieure en droit belge. En effet, la Cour de justice de l’Union européenne (dans son arrêt Khan Yunis et Baabda de 2024) n’impose pas qu’une telle demande soit qualifiée comme demande ultérieure, admettant seulement que cette qualification n’est pas contraire au droit de l’Union. Par ailleurs, même en cas de demande qualifiée d’ultérieure par la loi, la Cour du travail rappelle que toute limitation du droit à l’aide matérielle doit reposer sur une décision motivée et individuelle. 

Inès van Lamsweerde

A. Arrêt

L’appelant est un ressortissant palestinien reconnu réfugié en Grèce ayant introduit une demande de protection internationale en Belgique. L’Agence fédérale pour l’accueil des demandeurs d’asile (ci-après « Fedasil ») refuse de lui octroyer une aide matérielle, à l’exception de l’accompagnement médical, au motif qu’il a obtenu la protection internationale en Grèce. Le vice-président du Tribunal du travail de Bruxelles, en référé, avait rejeté le recours introduit contre cette décision, estimant que l’urgence n’était pas établie, l’intéressé ayant lui-même créé la situation d’urgence en quittant volontairement la Grèce sans démontrer, par des éléments concrets, que son retour y entraînerait une situation de dénuement matériel extrême. La présente affaire constitue un recours contre cette ordonnance, dirigé tant contre Fedasil que contre l’État belge. Pour ce faire, la Cour du travail examine successivement la qualité de l’État belge pour répondre à l’action, la condition d’urgence, la qualification de la demande de protection internationale, l’obligation de motivation individuelle et l’absence de force majeure.

1. La qualité de l’État belge pour répondre à l’action 

Tout d’abord, la Cour établit la qualité de l’État belge pour répondre à la demande. Bien que l’article 56, § 1er, de la loi du 12 janvier 2007 sur l’accueil des demandeurs d’asile et de certaines autres catégories d’étrangers (ci-après « loi accueil ») désigne Fedasil comme organisme responsable pour l’aide matérielle dans le cadre de l’accueil de demandeurs de protection internationale, la directive 2013/33 (ci-après « directive accueil ») fait naître une obligation directe à la charge de l’État membre. La Cour cite également l’article 8 de la loi du 16 mars 1954, rappelant que la secrétaire d’État à l’Asile et la Migration – une fonction désormais remplacée par celle de ministre – exerce un pouvoir de gestion sur Fedasil.

2. L’urgence 

La Cour rappelle que l’urgence doit être démontrée par le demandeur, mais qu’elle peut être présumée en cas de menace à des droits fondamentaux, tels que l’interdiction des traitements inhumains ou dégradants. Elle retient deux éléments pour établir l’urgence. Premièrement, la Cour observe la situation précaire du demandeur et l’impossibilité de la société civile belge à venir en aide à tous les demandeurs de protection internationale, particulièrement en ce qui concerne leur hébergement. De plus, elle prend note des milliers de condamnations de Fedasil depuis 2022 pour manquements à ses obligations d’accueil. Elle rejette l’argument de l’État belge selon lequel le demandeur devait prouver son absence totale d’aide, jugeant cette preuve trop difficile à apporter.

L’État belge invoque alors le statut de protection en Grèce de l’appelant et soutient qu’il a causé lui-même l’urgence en quittant ce pays dans lequel, selon l’État belge, il pourrait bénéficier de l’aide matérielle. Le Tribunal de première instance avait suivi cet argument, faute de preuve d’une situation de dénuement matériel extrême dans laquelle se trouverait l’appelant en Grèce. Fedasil invoque, quant à elle, le principe de confiance mutuelle, affirmant que seul le Commissariat général aux réfugiés et aux apatrides (ci-après « C.G.R.A. ») peut le renverser. La Cour précise que, même si seul le C.G.R.A. est compétent pour examiner l’accès à l’aide matérielle en Grèce au stade de la décision de recevabilité de la demande de protection internationale, la situation en Grèce doit être prise en compte dès le stade de l’accueil. La Cour relève pour ce faire que le CGRA n’a pas pris de décision d’irrecevabilité de la demande de protection internationale. En outre, elle rappelle que le principe de confiance mutuelle ne peut justifier une atteinte aux droits fondamentaux. Enfin, la Cour cite l’arrêt du Conseil d’État du 27 décembre 2024 qui avait précisément rejeté l’argument selon lequel un demandeur aurait lui-même provoqué l’urgence en quittant l’État membre où il bénéficiait d’une protection internationale. Dès lors, l’urgence est reconnue.

3. Première demande ou demande ultérieure ?

La Cour se penche ensuite sur la question de savoir s’il s’agit d’une première demande ou d’une demande ultérieure. Fedasil s’appuie sur l’arrêt Khan Yunis et Baabda de la Cour de justice de l’Union européenne (ci-après « C.J.U.E. ») pour qualifier la demande de l’appelant de demande ultérieure afin de justifier la limitation de l’aide matérielle sur base de l’article 4, §§ 3 et 4, de la loi accueil. La Cour ne suit pas son raisonnement, car si elle considère que l’arrêt Khan Yunis et Baabda n’interdit pas une réglementation qualifiant une demande de protection internationale d’une personne ayant déjà introduit une demande dans un autre État membre de « demande ultérieure », elle n’en déduit pas pour autant une telle interprétation en droit belge. En effet, la Cour du travail note que le droit belge fait, à tout le moins prima facie, une distinction entre une demande ultérieure et une demande d’une personne ayant déjà obtenu le statut de réfugié dans un autre État membre. La Cour se réfère à plusieurs éléments législatifs. Premièrement, les travaux préparatoires de la loi du 21 novembre 2017 modifiant la loi du 15 décembre 1980 (ci-après « L.E. ») et la loi accueil, et l’article 1er, 20°, L.E., renvoient à une décision finale non susceptible de recours devant le Conseil du contentieux des étrangers (ci-après « C.C.E. »), supposant donc une première demande en Belgique et non en Grèce. De plus, la procédure de la demande ultérieure doit se dérouler dans la langue utilisée lors de la première demande, c’est-à-dire le français ou le néerlandais. En outre, l’article 57/6, § 3, L.E. distingue clairement deux types de situations pour lequel le C.G.R.A. dispose de délais différents pour déclarer la demande irrecevable : « le demandeur bénéficie déjà d’une protection internationale dans un autre État membre de l’Union européenne » au point 3°, dont l’éventuelle décision d’irrecevabilité doit être prise dans les 15 jours, et « le demandeur introduit une demande ultérieure de protection internationale pour laquelle aucun élément ou fait nouveau au sens de l’article 57/6/2 n’apparaît ni n’est présenté par le demandeur » au point 5°, dont l’éventuelle décision d’irrecevabilité doit être prise dans les dix jours. Enfin, le demandeur a reçu une annexe 26 (et non 26quinquies), et le C.G.R.A. n’a pas statué sur l’irrecevabilité de la demande dans les dix jours, délai prévu pour les demandes ultérieures.

La Cour conclut ainsi que Fedasil ne peut pas refuser l’aide matérielle sur base de l’article 4, § 1er, 3°, de la loi accueil.

4. L’obligation de motivation individuelle

La Cour rappelle également qu’en tout état de cause, toute limitation de l’aide matérielle par Fedasil doit faire l’objet d’une décision individuelle dûment motivée, conformément à l’article 4, §§ 3 et 4, de la loi accueil et conformément à la jurisprudence de la Cour constitutionnelle. En effet, l’aide matérielle est la règle, et toute restriction à cette aide doit rester une exception justifiée au cas par cas. En l’espèce, la motivation de Fedasil était générique et ne tenait pas compte de la vulnérabilité particulière du demandeur, en raison de sa qualité de ressortissant palestinien. Par ailleurs, Fedasil ne démontre pas avoir pris en considération le droit de l’appelant à une vie digne.

5. L’absence de force majeure

Enfin, l’État belge invoque la force majeure, mais la Cour rejette également cet argument. La Cour du travail rappelle que, selon la C.J.U.E., la saturation des structures d’accueil ne constitue pas une exception à l’obligation d’accueil. De plus, l’incapacité d’héberger tous les demandeurs d’asile ne dispense pas l’État de leur offrir une forme d’accueil, d’autant que d’autres modalités que l’hébergement en nature sont prévues par la loi accueil, telles que l’accueil sous forme d’aide sociale à charge d’un CPAS. La Cour estime en outre que la crise de l’accueil était prévisible et évitable, car longue et récurrente depuis plusieurs années, et imputable dans son chef, en ce qu’elle s’empire à cause de la lenteur des procédures d’asile pour lequel l’État belge est responsable. En outre, l’accueil réservé aux Ukrainiens démontre, selon la Cour, que l’État est capable de respecter ses obligations en matière d’accueil.

La Cour du travail déclare ainsi la demande fondée et condamne l’État belge et Fedasil solidairement à une astreinte de 100 euros par jour, plafonnée à 20 000 euros, de non-exécution de l’arrêt.

B. Éclairage

L’arrêt apporte un éclairage sur la réception de la jurisprudence de la C.J.U.E. en droit belge en ce qui concerne la qualification d’une première demande de protection internationale d’un demandeur ayant déjà introduit une telle demande dans un autre État membre de l’Union. De plus, elle souligne l’importance de la motivation individuelle en cas de limitation de l’aide matérielle et ouvre la voie à une réflexion sur les enjeux juridiques de la distinction entre première demande et demande ultérieure. 

1. L’arrêt Khan Yunis et Baabda de la Cour de justice de l’Union européenne

L’arrêt Khan Yunis et Baabda est invoqué par Fedasil qui justifie la limitation à l’aide matérielle en qualifiant la demande de protection internationale de l’appelant de demande ultérieure. Dans cet arrêt, la C.J.U.E. avait jugé conforme à la directive accueil une réglementation allemande permettant de déclarer irrecevable une demande de protection internationale d’une personne dont une demande dans un autre État membre a été rejetée. La Cour avait toutefois précisé que cette déclaration d’irrecevabilité n’est possible que si la décision de rejet dans l’autre État membre est définitive et non susceptible de recours. La Cour avait également admis une telle déclaration d’irrecevabilité dans le cas d’un retrait implicite de la demande – pour autant que le délai de neuf mois, à l’issue duquel le retrait devient définitif, soit respecté. 

Cette approche, fondée dans le principe de confiance mutuelle du droit européen, a été critiquée – notamment par Matthieu Lys dans les Cahiers de l’EDEM – pour son manque de prise en compte de la jurisprudence relative aux circonstances exceptionnelles qui s’oppose au transfert d’un demandeur de protection internationale quand il existe un risque de traitement inhumain ou dégradant dans l’autre État membre, qu’il soit systémique ou révélé par un examen individuel. L’arrêt a également été critiqué par Matthieu Lys pour avoir admis que le retrait implicite d’une demande puisse fonder sa qualification de demande ultérieure. En effet, une demande ultérieure suppose en principe la présentation d’éléments nouveaux. Par conséquent, si aucun nouvel élément n’est présenté, le deuxième État membre pourrait donc en principe rejeter la demande sans qu’aucun État membre ait in fine fait un examen au fond quant aux craintes de persécution du demandeur. Le demandeur pourrait dès lors être renvoyé vers son pays d’origine sans n’avoir jamais bénéficié d’un examen effectif de sa demande de protection.

2. Deux contextes différents

Contrairement à l’arrêt de la C.J.U.E., la décision analysée concerne une situation où l’appelant avait bien obtenu une protection internationale dans un autre État membre de l’Union (en l’occurrence, la Grèce). Dans l’affaire devant la Cour du travail, il apparaît encore moins intuitif de qualifier la demande de demande ultérieure dès lors qu’elle fait suite à une reconnaissance, et non à un rejet. En effet, la notion de demande ultérieure vise principalement les cas dans lesquels une personne introduit une nouvelle demande après un rejet de sa précédente demande. L’Agence de l’Union européenne pour l’asile (EUAA) définit ainsi dans son guide la demande ultérieure comme une demande introduite à la suite d’une décision finale négative. La Cour du travail ne relève toutefois pas cet élément, ce qui laisse entendre que son interprétation pourrait également s’appliquer à la situation d’un requérant débouté de sa demande de protection internationale dans un autre État membre, comme c’était le cas dans l’affaire devant la C.J.U.E.

3. La réception de l’arrêt Khan Yunis et Baabda en droit belge

Dans l’arrêt commenté, la Cour du travail qualifie la demande introduite en Belgique par un réfugié reconnu en Grèce non pas de demande ultérieure, mais bien de première demande. Elle souligne que si l’arrêt de la C.J.U.E. n’interdit pas la possibilité de déclarer une telle demande irrecevable, le droit belge, pour sa part, établit, à tout le moins prima facie, une distinction entre une telle demande et une demande ultérieure. Pour fonder son raisonnement, la Cour se réfère à plusieurs dispositions légales et éléments de pratique. D’abord, les travaux préparatoires et l’article 1er, 20°, L.E. définissent une « décision finale » comme une décision ne pouvant plus faire l’objet d’un recours devant le C.C.E., ce qui suppose une première procédure menée en Belgique. Ensuite, la Cour invoque l’article 51/4, § 2, alinéa 4, L.E. qui impose que la procédure relative à une demande ultérieure se déroule dans la même langue que la première demande, à savoir le français ou le néerlandais. Une première demande introduite dans un autre État membre, rédigée dans une autre langue – en ce compris l’anglais – ne peut donc remplir cette condition. Par ailleurs, la Cour se réfère à l’article 57/6, § 3, 3° et 5°, L.E., qui distingue expressément deux catégories de demandeurs et leur applique des délais de déclaration d’irrecevabilité différents (alinéas 3 et 4), ce qui constitue un élément explicite en faveur de la distinction. Enfin, la Cour rappelle deux éléments de fait particulièrement révélateurs. D’une part, l’appelant a reçu une annexe 26, correspondant à une première demande, et non une annexe 26quinquies, relative à une demande ultérieure. D’autre part, le C.G.R.A. n’a pas adopté de décision d’irrecevabilité dans le délai de dix jours prévu pour les demandes ultérieures.

On peut se demander si, en modifiant certaines dispositions législatives et en adaptant les pratiques administratives, une demande de protection internationale introduite en Belgique par une personne ayant déjà introduit une demande dans un autre État membre pourrait, à l’avenir, être qualifiée de demande ultérieure. Toutefois, en l’état actuel du droit belge, une telle demande ne peut être considérée comme telle. La Cour du travail a par conséquent jugé que la limitation de l’aide matérielle ne pouvait se fonder sur l’article 4, § 1er, 3°, de la loi accueil, dès lors qu’il ne s’agissait pas d’une demande ultérieure. À la lecture de cette disposition, le cas d’un demandeur ayant introduit une demande dans un autre État membre de l’Union ne relève d’aucune des catégories prévues. En effet, l’article 4, § 1er, de la loi accueil dispose :

« L’Agence peut limiter ou, dans des cas exceptionnels, retirer le droit à l’aide matérielle :

1° lorsqu’un demandeur d’asile refuse le lieu obligatoire d’inscription désigné par l’Agence, ne l’utilise pas ou l’abandonne sans en avoir informé l’Agence ou, si une autorisation est nécessaire à cet effet, sans l’avoir obtenue ; ou 

2° lorsqu’un demandeur d’asile ne respecte pas l’obligation de se présenter, ne répond pas aux demandes d’information ou ne se rend pas aux entretiens personnels concernant la procédure d’asile dans un délai raisonnable ; ou

3° lorsqu’un demandeur d’asile présente une demande ultérieure, jusqu’à ce qu’une décision de recevabilité soit prise en application de l’article 57/6/2, § 1er, de la loi du 15 décembre 1980 sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et l’éloignement des étrangers ; ou 

4° en application des articles 35/2 et 45, alinéa 2, 8° et 9°. »

La liste semblant être de nature exhaustive, il est dès lors difficile d’imaginer comment Fedasil pourrait actuellement justifier une limitation de l’aide matérielle de demandeurs de protection internationale ayant introduit une demande dans un autre État membre. 

Ainsi, l’arrêt met en lumière les limites au principe de confiance mutuelle en droit européen, non pas en invoquant directement les exceptions au principe de confiance mutuelle – telles que les défaillances systémiques ou individuelles d’un autre État membre en matière d’accueil – mais en s’appuyant sur des arguments tirés de la législation et des pratiques nationales afin de maintenir la qualification de la demande de première demande.

4. Le garde-fou ultime de toute limitation de l’aide matérielle : la motivation individuelle 

De plus, la Cour du travail souligne dans cet arrêt l’obligation de motivation individuelle de toute limitation de l’aide matérielle, en ce compris lorsqu’il s’agit d’une demande ultérieure, rappelant ainsi une garantie fondamentale en matière d’accueil de demandeurs de protection internationale. Il existe donc bien une double condition à la limitation de l’aide matérielle : d’une part, que la situation du demandeur relève de l’une des quatre catégories énumérées à l’article 4, § 1er, de la loi accueil et d’autre part, que la limitation de l’aide soit motivée de manière individualisée.

5. Les enjeux de la distinction entre les deux demandes

Outre la possibilité de limiter l’aide matérielle de demandeurs de protection internationale en cas de demande ultérieure, la distinction entre une première demande et une demande ultérieure revêt d’autres enjeux importants en droit belge. L’arrêt commenté protège ce faisant l’appelant, et potentiellement les personnes dans la même situation dans le futur, d’autres conséquences négatives qu’il subirait si sa demande était qualifiée de demande ultérieure. En effet, cette distinction influence également l’effet suspensif du recours devant le C.C.E. (article 39/70 L.E.). En outre, pour qu’une demande ultérieure soit recevable, elle doit contenir des éléments nouveaux au sens des articles 51/8 et 57/6/2, § 1erL.E. Ces éléments doivent être survenus après la décision sur la première demande ou ne pas avoir été présentés auparavant en raison de difficultés de preuves, de troubles psychologiques du demandeur ou de tabous culturels[1]. Si aucun nouvel élément n’est apporté, la demande de protection internationale sera déclarée irrecevable. Ainsi, la qualification d’une demande comme « ultérieure » a des conséquences juridiques significatives qui touchent tant au fond qu’à la procédure.

Conclusion

L’arrêt commenté précise que, en droit belge, une demande de protection internationale introduite par une personne ayant déjà introduit une demande dans un autre État membre de l’Union européenne ne peut pas être qualifiée de demande ultérieure – bien que la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne dans son arrêt Khan Yunis et Baabda admet qu’un État membre puisse, sous certaines conditions, qualifier une demande comme étant ultérieure après une décision négative définitive ou un retrait implicite dans un autre État membre. Cette interprétation repose sur une lecture combinée de plusieurs dispositions légales belges et de pratiques administratives des autorités belges. Elle permet d’écarter l’application de l’article 4, § 1er, 3°, de la loi accueil, qui prévoit la possibilité de limiter l’aide matérielle dans les cas de demande ultérieure. La Cour rappelle également que toute restriction à l’aide matérielle doit être fondée sur une motivation individualisée et rigoureusement justifiée, ce qui constitue une garantie essentielle pour la protection des droits fondamentaux des demandeurs de protection internationale. 

C. Pour aller plus loin

Lire l’arrêt : C. trav. Bruxelles, 13 mars 2025, R.G. n° 2025/CB/2.

Jurisprudence : 

  • C.J.U.E., 19 décembre 2024, Khan Yunis et Baabda, aff. jointes C-123/23 et C-202/23, EU:C:2024:1042.
  • C.E., 27 décembre 2024, n° 261.887.
  • C.C., 30 juin 2014, n° 95/2014.

Doctrine : 

Pour citer cette note : I. van Lamsweerde, « Première demande de protection internationale ou demande ultérieure ? La réception en droit belge de la jurisprudence Khan Yunis et Baabda de la Cour de justice de l’Union européenne », Cahiers de l’EDEM, mai 2025.


 


[1] EUAA, « Guide pratique sur les demandes ultérieures », décembre 2021, pp. 26-27.