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Recherche plurielle

iacchos | Louvain-la-Neuve

Une initiative collective

Depuis 2012, l’Institut IACCHOS mène une réflexion approfondie sur les modes de production, diffusion et valorisation de la recherche en sciences sociales. Ce travail a mobilisé plus de 200 chercheur·euses autour d’un constat commun : la recherche universitaire traverse une phase de transition majeure.

Plutôt que de rejeter la notion d’« excellence », il s’agit de l’interroger :

  • Qualité ≠ Performance : la survalorisation du volume de publications nuit au temps long de la recherche
     
  • Slow Science ? Une invitation à ralentir, mais à nuancer selon les trajectoires et statuts des chercheur·euses

Des mutations majeures sont en cours et nous inscrivons nos recherches au coeur de celles-ci :  
 

  • Open Science : accès ouvert, données partagées, logiciels libres… un nouvel écosystème se dessine L’Open Science ouvre des voies prometteuses mais soulève des questions inédites. Elle réinterroge le modèle économique de la diffusion et de la valorisation de la recherche. À terme, elle devrait avoir des effets structurels sur l’ensemble de la chaîne de production de la recherche universitaire, sans qu’il soit encore possible d’en identifier clairement les impacts. Parallèlement, des initiatives importantes ont été prises ces dernières années, visant à anticiper les impacts possibles de l’Open Science mais aussi à alerter sur les dérives d’une recherche confondant performance (à court terme) et excellence (sur le long terme).  
     
  • Declaration On Research Asessment (DORA) : initiée en 2012 par l’American Society for Cell Biology | appel à de nouvelles pratiques d’évaluation, dépasser l’impact factor, juger les recherches sur leur contenu, non sur le prestige des revues Le coeur de cette déclaration repose sur la volonté de soutenir toujours davantage la qualité de la recherche, mais aussi – et pour cette raison même – sur la nécessité de séparer l’évaluation des revues de l’évaluation des personnes et des projets. Les propos qui s’inscrivent dans la déclaration traduisent une volonté à plusieurs niveaux : clarifier le contexte et les effets du mode de fonctionnement actuel, en proposant un diagnostic provenant de l’intérieur même de la communauté universitaire ; montrer en quoi ces questions concernent aussi bien les personnes que les organisations ; proposer des pistes d’action concrètes. Dans le cadre d’une université ayant à coeur de remplir des missions de service à la société, cette note de travail met l’accent sur les enjeux concrets de qualité de la recherche, de bien-être des personnels et de gouvernance. A la fin de document, deux schémas de synthèse viennent compléter l’ensemble.

Revenons en quelques lignes sur un portrait assez large des résultats de notre réflexion collective. 
 

Pluralisme

La pluralité est à la fois une pratique et une exigence. Elle suppose de prolonger la pluralité des objets par une authentique pluralité des modes de diffusion et de valorisation de la recherche.

  • Diversité des objets d’étude situés, des méthodes, des approches et des épistémologies
     
  • Sortir des modes actuels de d’évaluation de la recherche ; actuellement, il est coutume pour une recherche d’être inscrite dans une épistémologie (néo-)positiviste, puis être publiée en langue anglaise, dans une revue à « haut facteur d’impact », qui impose généralement une structuration standardisée
     
  • Donner la place au mode de diffusion des connaissances dans la société ; traduire les sciences dont l’objet porte sur les changements sociaux, concrètement, dans une politique d’évaluation plus ouverte
     

Approche globale
 

La qualité de la recherche scientifique ne saurait se faire contre la communauté qui la produit. Le deux sont indissociablement liés, que cela passe par l’amélioration du bien-être au travail pour l’ensemble des personnels ou que cela implique, plus spécifiquement, des améliorations à apporter dans les relations sociales, l’organisation du travail ou le pilotage des entités de recherche.

  • La qualité de la recherche est indissociable du bien-être des personnes qui la produisent ; attention portée à la façon dont fonctionne une communauté scientifique en tant qu’entité collective
     
  • Repenser l’organisation du travail, les rapports de genre, les relations hiérarchiques et la gouvernance pour renforcer les collectifs de recherche

Nos chercheur·euses expriment leurs préoccupations sur de nombreux aspects. 
 

Côté personnes 
 

Pression à la productivité, isolement disciplinaire, sur-spécialisation Tensions entre attentes institutionnelles et réalités du métier 
 

Côté structures 
 

Concurrence interne, surcharge administrative, manque de reconnaissance du travail invisible 
 

Côté diffusion 
 

Érosion de la diversité des formats (monographies, vidéos, rapports…)
Vulgarisation encore sous-valorisée

Nos propositions concrètes

  1. Favoriser une recherche de qualité sur le long terme 
     
  • Encourager la créativité, la réflexivité et l’engagement citoyen 
  • Revaloriser les formes non standardisées de publication 
     
  1. Renforcer le bien-être au travail 
     
  • Meilleures conditions matérielles 
  • Partage de compétences entre métiers 
  • Temps pour se ressourcer et équilibrer vie personnelle et professionnelle
     
  1. Repenser la gouvernance 
     
  • Management par la confiance
  • Espaces de travail coopératifs 
  • Reconnaître les communautés de recherche comme des acteurs centraux 
     
  1. Diversifier les critères d’évaluation 
     
  • Multilinguisme, reconnaissance des publications « en contexte » 
  • Prise en compte du processus de recherche, pas seulement des résultats 
  • Soutien à la diversité des parcours et des engagements scientifiques 
     

En conclusion 

La recherche universitaire ne peut se réduire à une logique productiviste. Elle doit s’adapter aux mutations du monde contemporain en réaffirmant ses valeurs : pluralité, exigence, responsabilité. 

Pour une recherche plurielle, ouverte, critique et engagée.