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Discours de Jean Hilgers, président du CA

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Rentrée académique 2025-2026

L’année académique 2025 s’ouvre dans un contexte particulier, celui des 600 ans de l’UCLouvain.

Six siècles d’une extraordinaire aventure humaine.

Six  siècle  d’histoire,  de  savoir,  de  découvertes, d’engagement et de transmission.

Six siècles traversés par des soubresauts, des crises voire des guerres. Mais ceux-ci n’ont jamais empêché notre Université de garder un cap, de grandir et de servir.

Une année anniversaire, une communauté en mouvement

Les festivités du 600e anniversaire qui jalonneront encore les semaines et les mois à venir ne sont pas anecdotiques. Elles constituent autant d’occasions de célébrer ce que nous sommes : une communauté unie, impliquée, diverse, ouverte et tournée vers l’avenir.

Une communauté qui mesure aussi la nécessité mais également la chance qu’elle a, d’évoluer dans un lieu où la liberté d’expression n’est pas un vain mot, où la liberté académique est réaffirmée, sans crainte de mesures de rétorsion.

Ces libertés sont menacées en divers endroits du globe. Paradoxalement, elles sont même attaquées aujourd’hui dans un pays historiquement et intellectuellement très attaché à une conception maximaliste de ces dernières.

Ce n’est pas vous que je dois convaincre de l’importance de ces libertés. La pérennité de notre institution tient, notamment, à l’énergie avec laquelle elle a toujours résisté aux  pressions  visant  à  les  limiter,  dans  le  souci  de « transmettre » et d« accroitre » les connaissances (nos deux missions fondamentales).

Dans un contexte instable, où les droits fondamentaux sont mis à rude épreuve, l’UCLouvain a fait progresser ses réflexions sur l’éthique des partenariats scientifiques, à l’instar des autres universités. Aussi, une commission des partenariats responsables a été mise sur pied de sorte à trouver les bons points d’équilibre entre la préservation de l’éthique et la liberté scientifique. La tâche est ardue mais nécessaire.

Les pratiques d’Open Science poursuivent leur développement. Elles encouragent les modèles émergents de diffusion et de partage des résultats de la recherche au travers de structures dans lesquelles chercheurs et chercheuses gardent la maîtrise, sans devoir subir des logiques de profit excessif ou même de rentes dont bénéficient de grands éditeurs scientifiques. Il en va de notre indépendance.

Notre recherche scientifique s’inscrit dans un contexte de progrès technologique en forte accélération. A l’image des attentes de la société à son égard. L’université valorise ses recherches et les transferts de technologie, lesquels améliorent notre compréhension du monde et génèrent des externalités positives.

Mais la technologie n’est pas une fin en soi. Il est essentiel de tabler aussi sur la recherche fondamentale. Nous devons nous appuyer sur des recherches de fond qui ne produisent le plus souvent leurs résultats que dans le temps long. Qu’il s’agisse du climat, des ressources naturelles, de la démographie, de l’alimentation, de la santé, mais encore de l’IA ou de la géopolitique (et j’en passe), seule une approche globale, holistique, faite d’essais et d’erreurs et d’itérations multiples permet de répondre aux questions complexes. C’est précisément la vocation de la recherche universitaire. Cette recherche interdisciplinaire (qui combine plusieurs disciplines, quelquefois très éloignées les unes des autres) et transdisciplinaire (qui associe à la recherche des acteurs de terrain) crée des espaces de dialogues, des lieux d’échanges de connaissances et de méthodes favorisant des rencontres fructueuses entre chercheurs d’horizons différents : le biologiste et la politologue, la neurologue et le philosophe, la médecin et l’informaticien – on pourrait multiplier bien sûr les exemples. C’est de cela que naissent souvent les innovations de rupture.

Dès lors, ces deux types de recherche : fondamentale et appliquée -doivent être financées. Elles sont interdépendantes et ce serait une erreur de vouloir les scinder. Comme il est hasardeux d’opposer les divers domaines du savoir scientifique en fonction de leur prétendue différence en termes d’impact sociétal.

Dans le domaine de l’enseignement, les défis ne manquent pas, non plus.

Parmi ceux qui marqueront l’année à venir figure celui des rythmes académiques, lequel est indissociable de la cadence des apprentissages, et donc de la réussite. Depuis près d'un an, la communauté universitaire s’est remise au travail sur la question, avec l’ambition de combler le fossé qui existe entre le moment des activités d'apprentissage et celui des évaluations (les étudiants étant évalués des mois voire des années après avoir suivi lesdites activités. D’opérer aussi une scission plus claire entre deux années académiques successives, dont le recouvrement actuel est souvent coûteux pour les enseignants, les administrations et les étudiants. Et enfin, de rendre notre calendrier plus compatible avec celui de l'enseignement obligatoire tel qu'il a été réformé.

Les discussions vont bon train, la concertation interuniversitaire également. Dans le cadre de ces débats, un mot d'ordre revient très régulièrement, celui de la flexibilité. Et cette volonté de donner aux établissements un peu plus d’autonomie dans le choix des dates où démarrent une série d'activités et celui des périodes au cours desquelles ne peuvent se dérouler d'autres activités...

La raison en est simple. Nous hébergeons une foultitude d'offres de formation : initiale et continue, présentielle, hybride, distancielle, multisite ou décentralisée, seuls ou avec des partenaires publics ou privés, belges ou étrangers. Sans oublier toutes les contraintes des stages, des mémoires et autres activités mêlant apprentissage et évaluation et qui obéissent à un calendrier infiniment plus complexe que celui qu'on nous impose, que nous ne pouvons qu’inviter notre gouvernement à donner un peu plus d’autonomie aux établissements. Nous avons pour habitude de nous concerter avec nos partenaires universitaires et de hautes écoles. Nous avons un intérêt partagé à nous entendre; nous le savons et y travaillons proactivement. 

Parce que l’enseignement supérieur, c’est évidemment un paysage global. On finit par l'oublier tant on s’est focalisé sur le parcours de l’étudiant. Rappelons-nous que le «décret paysage» entendait en premier lieu remodeler les structures du «paysage de l'enseignement supérieur». Après ses dix années d'existence, c’est un bon moment pour évaluer la gouvernance mise en place à cette époque et examiner si les structures et leur fonctionnement sont fidèles aux principes fondateurs : clarté et cohérence dans le mandat, dans la répartition des responsabilités avec les établissements, efficacité décisionnelle, simplicité de fonctionnement, coordination institutionnelle, efficience des ressources, capacité d’adaptation et d’innovation, tout ceci afin notamment d’améliorer le fonctionnement global du système et de réduire le coût, d’éviter une inflation de tâches de gestion pour les établissements, ainsi qu'une perte de lisibilité.

Là aussi, les principes d’autonomie et de confiance aux établissements doive trouver leur place, a fortiori dans le contexte où le sous-financement est présent et nous demande de pouvoir « réallouer » ou « redéployer » les moyens de manière suffisamment agile.

Notre université, elle aussi, s’est engagée à réfléchir à son organisation et ses structures, dans le contexte du multisites. L’UCLouvain a fortement évolué depuis ces dernières décennies. Sa structure équivaut, désormais, à celle d’une grande organisation multisites qui doit réaliser ses missions dans un contexte caractérisé par des défis contemporains en partie assez différents de ceux d’hier. Il est dès lors légitime de voir dans quelle mesure nous pouvons évoluer vers un mode de gouvernance qui permet de les rencontrer de façon plus souple et agile, sans pour autant renoncer à notre communauté de valeurs, ni à la cohésion de ses membres.

Cette stratégie de flexibilité doit se décliner, je l’ai dit, dans l’approche multisites de l’UCLouvain pour combiner l’excellence scientifique et pédagogique de notre Université, dans sa globalité avec un enracinement local et territorial très fort là où nous sommes présents.

Et c’est ce qui explique en bonne partie l’importance de nos investissements immobiliers académiques à LLN, à Woluwe et dans le Hainaut (singulièrement à Charleroi), mais aussi ceux en cours de développement dans Centre de Bruxelles, à savoir l’intensification de notre présence dans le quartier de la Rue du Marais, à distance quasi équivalente entre l’actuel site UCLouvain-St Louis et du Campus Bruxellois de la KU Leuven, dont je salue ici le Recteur sortant Luc Sels, qui a tant fait pour le rapprochement entre les deux universités sœurs et salue également la nouvelle Rectrice, Séverine Vermeire, avec qui nous nous réjouissons de travailler.

Le projet de Saint-Louis permet de repenser les espaces de manière dynamique et inclusive dans une philosophie de campus urbain, en améliorant ses espaces d’accueil d’étudiants, de programmes et de formations, et en renforçant notre identité en plein cœur de Bruxelles, en osmose avec les institutions universitaires, publiques, culturelles et sportives avoisinantes.

Chaque campus possède ses particularités, ses atouts et ses contraintes. Mais globalement, notre développement s’inscrit dans le cap stratégique que nous nous sommes fixés en lien avec les objectifs de développement durable et de transition. Entre autres buts, nous nous sommes donné les moyens d’atteindre la neutralité carbone de notre patrimoine bâti dès 2035. Cela se fera, notamment, par une ambitieuse volonté de rénovation de nos bâtiments du secteur académique et social. Une attention spécifique devra être portée au site de Woluwe qui expérimente actuellement un défi majeur : la reconstruction des CUSL. Le secteur des hôpitaux et de la santé foisonne d’enjeux et de challenges qui doivent recevoir toute l’attention possible de l’université, que ce soit à Bruxelles où dans le namurois.

Un appel à l’engagement collectif

L’année qui s’ouvre sera « exigeante ». Les tensions internationales,  les  attentes  sociétales  et  les défis budgétaires sont réels. Mais je suis convaincu que nous avons l’énergie et les ressources, humaines, intellectuelles et organisationnelles, pour y faire face. C’est totalement en phase avec notre volonté de donner plus de sens à nos actions, comme le plan stratégique de notre rectrice nous y invite. Plan qui enjoint de porter une attention accrue au bien-être du personnel. Après tout, sans la cohésion de la communauté, nous ne pouvons ni résister aux tempêtes, ni accomplir de grandes choses.

L’université est aussi au service de celles et ceux qui la font tourner au quotidien.

Conclusion

En 1425, nos prédécesseurs ont fondé une université pour éclairer    leur    temps. En 2025, c’est à nous qu’il revient de raviver la flamme, de transmettre cette lumière et d’éclairer le champ du savoir. C’est ça qui permet de semer et faire germer les idées, de tracer de nouveaux sillons, de récolter et de nourrir les esprits.

Avec lucidité, compétence, courage, enthousiasme et optimisme, ambition et humilité. Autant de qualités qui sont très présentes ici.

Et c’est confiant de cela, que je vous souhaite à toutes et tous une excellente année académique.